Assomption 2024 : l’émouvante lettre de l’Abbé Eugène Diouf à la Bienheureuse Vierge Marie

Vierge Marie

À l’occasion de la fête de l’Assomption 2024, l’Abbé Eugène Diouf a livré une homélie émouvante sous la forme d’une lettre adressée à la Vierge Marie. Le Curé de la paroisse Épiphanie de Nianing y mêle avec éloquence théologie, poésie et prières, offrant une réflexion profonde sur la place de Marie au sein de l’Église. Cette méditation célèbre le rôle unique de la Vierge dans l’histoire du salut, tout en l’implorant d’intercéder pour l’humanité. Empreinte d’une tendresse filiale, cette homélie aborde avec sensibilité et pertinence les défis contemporains, de la crise de la foi à l’évolution de la condition féminine, témoignant de la capacité du message marial à résonner avec les préoccupations actuelles.

Très chère Maman Marie, je voudrais, en ce jour où l’Eglise se souvient avec une joie reconnaissante, de ton élévation, corps et âme, à la gloire du ciel, te souhaiter, au nom de tous mes frères et sœurs en Christ et en humanité, une très bonne fête !

Lorsque, le 1er novembre de l’an de grâce 1950, ton enfant, le serviteur des serviteurs de Dieu, le Pape Pie XII, de vénérée mémoire, proclamait officiellement et de manière infaillible la vérité de foi que nous célébrons en ce jour, il portait sur les honneurs de l’autel, ce que le peuple de Dieu a depuis toujours vénéré en toi, sans encore pouvoir le nommer comme tel. Parce que tu fus créée toute pure, sans la moindre trace du péché originel – destinée que tu étais à devenir la demeure très pure du Fils éternel du Dieu trois fois saint – et parce que tu as vécu dans une fidélité à Dieu à nulle autre pareille, le Seigneur t’a fait un privilège unique en élevant ton intégralité et ton intégrité jusqu’à la gloire de la Sainte Trinité, t’établissant par le fait même, Reine de l’Univers.

Toutes choses que l’Eglise réaffirma au Concile Vatican II. Parlant de toi, Maman Marie, la Constitution dogmatique sur L’Eglise, « Lumen Gentium », affirme :

« Enfin, la Vierge immaculée, préservée par Dieu de toute souillure de la faute originelle, ayant accompli le cours de sa vie terrestre, fut élevée corps et âme à la gloire du ciel, et exaltée par le Seigneur comme la Reine de l’univers, pour être ainsi plus entièrement conforme à son Fils, Seigneur des seigneurs (cf. Ap 19, 16), victorieux du péché et de la mort » (L. G 59).

Très chère Maman Marie, tu nous as appris, quand nous te regardons et te contemplons, à regarder et à contempler ton Fils Jésus ! Lorsque nous te vénérons, tu nous donnes l’occasion de t’aimer plus encore, tout en nous murmurant cependant, que seul Dieu est digne d’adoration ! Lorsque, telles des brebis égarées, nous semblons nous suffire à nous-mêmes et vivons dans l’illusion de pouvoir nous passer de ton Fils, tendrement et sans relâche, tu te mets à notre recherche, comme tu le fis jadis pour ton Fils perdu trois jours durant, jusqu’à nous retrouver !

A travers, ton « fiat » donné de l’annonciation à la crucifixion de ton Fils, Tu es l’exemple parfait des réponses à donner aux projets de Dieu sur nous et pour le monde. Dans ton « magnificat », tu nous apprends à ne pas seulement demander à Dieu, mais à savoir le remercier, et même à le remercier avant de lui demander quoi que ce soit !

Et « quand – pour reprendre ce vers d’un célèbre poème de Charles Baudelaire – le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle sur l’esprit gémissant en proie aux longs ennuis ; et que l’horizon embrassant tout le cercle, il nous verse un jour noir plus triste que les nuits » (Slpeen) ; c’est-à-dire, quand tout devient difficile, quand nous broyons du noir, quand nous ne comprenons pas tout ce qui nous arrive et que nous sommes tentés de hurler la colère de nos « POURQUOI ? », tendrement tu nous murmures : « mon fils, ma fille, moi non plus, je ne comprenais pas tout du projet de Dieu sur moi et sur Yeshoua (Jésus), mais confiante, je gardais tous ces événements et les méditait dans mon cœur, habitée par la certitude que Dieu ne peut ni se tromper ni me tromper, et que comme le dira, plus tard mon fils l’Apôtre Paul, ‘ tout contribue au bien de ceux qui aiment Dieu’ (Rm 8, 28). C’est aussi forte de tout cela, Maman Marie, que toute ta vie durant, tu es restée une femme debout (stabat) et digne, jusqu’au pied de la croix, mère douloureuse (mater dolorosa) et bientôt mère glorieuse (mater gloriosa). Au cœur de tout cela, tu sais nous inviter à placer la prière, comme tu le fis avec les disciples de ton Fils au Cénacle dans l’attente de l’Esprit Saint. Toi, dont l’expérience de l’Esprit est si haute, apprends-nous à prier ton Fils, et à le prier sans jamais nous décourager. Apprends-nous aussi à savoir faire de nos prières, des actions, et de nos actions, des prières ! Tout pour la plus grande gloire de Dieu !

Oui, Maman Marie, les chrétiens ont raison de voir en toi l’image de la femme dont il est question dans cette vision du Livre de l’Apocalypse que nous venons d’entendre, femme glorifiée, protectrice de ses enfants et de l’Eglise de son Fils en butte, hier comme aujourd’hui, aux persécutions en provenance du dehors, mais aussi et hélas, du dedans :

« Un grand signe apparut dans le ciel : une femme, ayant le soleil pour manteau, la lune sous les pieds, et sur la tête une couronne de douze étoiles ». Merci à toi, gloire à toi ! En ce jour de ta fête, laisse – nous donc te chanter :

« Modi MARYAMA, linguer u linguer yi, bideew u fajar ».

Ref : « Jile jigen jan la ? Rafet kaar ni jant bi, weer wi fété ci suufi tankam, Jigen Jile jan la ? »

« Modi MARYAMA, linguer u linguer yi, linguer u xeet yi »

Très chère maman Marie, au nombre incalculable des prières à toi dédiée, il en est une composée par Saint Bernard de Clairvaux, fondateur de l’Ordre des Cisterciens, l’un de tes enfants du moyen âge dont la spiritualité mariale s’est répandue partout à travers le monde, et qui dans une merveilleuse prière a eu ses paroles à ton endroit : « Souvenez –vous douce, ô très miséricordieuse Vierge Marie, qu’on n’a jamais entendu dire qu’aucun de ceux qui ont eu recours à votre protection, imploré votre assistance, réclamé votre intercession ait été abandonné… ». Ensemble, reprenons intégralement cette prière en sérère ( « Wetandoxi Maria, xeek fa mosu mosu fud fané, ey mossano nan muk… »)

2- Animés d’une pareille confiance, et en ce jour qui t’es consacré, nous venons, chère Maman Marie, remettre entre tes saintes mains, nos demandes et supplications : Alors, souviens-toi :

-Souviens-toi, ô Mère de l’Eglise, de ton Eglise et de ses pasteurs, de tous ceux qui dévouent inlassablement, parfois au prix de sacrifices indicibles, à son service et son rayonnement. Protège les tous et toutes, des dragons des temps modernes, avides et assoiffés de pouvoir, de sang et de chair !

-Souviens-toi des fidèles engagés au sein de cette même Eglise et dans la société, au nom de leur foi en ton Fils Jésus. Couvre-les de ton manteau virginal et obtiens-leur de notre Seigneur d’être et de rester « sel de la terre » et « lumière du monde » (cf. Mt 5, 13-16)!

-Souviens-toi de nos familles, et en particulier des familles divisées, brisées de l’intérieur ou / et de l’extérieur, par l’avoir, le savoir et le pouvoir, mais aussi par la rancune, le mépris, le rejet…Fais que prévalent au sein de nos familles et communautés, et de nos pays, en particulier le nôtre de plus en plus dominé par les démons de la division, les valeurs de liberté, vérité, justice, amour, gage d’une paix authentique et durable !

-Toi, le modèle parfait de la femme, Toi dont le corps et l’âme ont été élevés jusqu’à la gloire du ciel, nous te prions d’inspirer à toute femme le respect de son propre corps – halte au ‘xessal’ ! – et à tout homme, le respect du sien et de celui de l’autre ainsi que l’égale dignité qu’il partage avec la femme, et donc le respect dû à toute femme : femme mère, femme épouse, femme sœur, femme consacrée… Penche-toi, en particulier sur le sort des femmes victimes de toute sorte de traite, et de violences, et panse leurs blessures !

N’oublies pas non plus, les hommes, les époux – beaucoup moins nombreux, il est vrai – maltraités par leurs épouses ! Alors, console, soulage, guéris les corps et cœurs brisés, la foi blessée !

– Tu as connu la maternité ! Aussi te supplions-nous, ô Marie, de jeter un regard plein de compassion sur les femmes et plus largement les couples en attente ou en manque d’enfant. A tous et toutes, à nos gouvernants en particulier, obtiens la grâce de savoir protéger et promouvoir la vie humaine dans toutes les phases de son développement, en particulier celle des enfants et des enfants à naître, des malades et porteurs de handicap ainsi que des personnes âgées et celles rendues au crépuscule de leur vie !

– Pour sauver le petit Jésus de la folie meurtrière d’Hérode, Tu as aussi connu l’exil, l’émigration : Alors, Maman Marie, « monstra te esse matrem » (« montre-toi mère ») et vole au secours de la jeunesse de nos pays, du nôtre en particulier, en proie aux sables mouvants du désespoir et dont nombre de corps sans vie ornent tristement nos déserts et ont fini de transformer la Méditerranée et l’Océan Atlantique en cimetières marins !

– Pour celles et ceux qui ploient sous le poids de leurs croix (échec, maladie, deuil, solitude, incompréhension…), nous mendions ta force et ta foi pour qu’ils restent toujours debout, malgré tout !

Et alors que tu es élevée à la gloire de la Trinité Sainte, nous te supplions de porter avec toi, tous nos frères et sœurs défunts et de continuer à accompagner notre pèlerinage terrestre jusqu’à son terme afin de nous faire parvenir à la Cité du ciel, où tu intercèdes, Mère et souveraine !

Ref : « Simieno Mariama tagassio, Mariama Simieno… »

« De Maria, nunquam satis » disait encore Saint Bernard, ie : « De Marie, on ne dira jamais assez ». A toi, Maman Marie, nous ne pouvons pas tout dire non plus, mais puisqu’une bonne maman sait comprendre son enfant avant même que ce dernier ne lui partage ce qu’il a dans le cœur, alors, très chère maman, s’il te plaît, permets-moi, pour finir, de déposer ce courrier à tes pieds, en signe d’offrande de ce que nous avons voulu et pu te dire et de ce que nous avons voulu mais n’avons pas pu te dire de notre bouche, mais qui monte du silence de nos cœurs. Tu sais bien, malgré nos égarements, que nous t’aimons très fort. Mais, apprends-nous à mieux t’aimer, car c’est ainsi que tu nous apprendras à mieux aimer et écouter ton Fils : « Faites tout ce qu’il (Jésus) vous dira » (Jn 2, 5).

Au nom de tous tes enfants, frères et sœurs en Christ et en humanité, je te remercie de m’avoir écouté aussi longuement, mais surtout, j’en suis sûr, aussi attentivement !

Pour tous tes enfants

Ton pauvre fils Abbé Eugène DIOUF

1 commentaire

  1. Merci pour cette riche et belle lettre destinée à notre douce et tendre Maman Marie qui nous écoute toujours.

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