Élisabeth Pouye, serial entrepreneure catholique et zélée pour Dieu : « Donnez à Dieu tout ce qui lui revient, il saura s’occuper de vous et de vos affaires »

Elisabeth Yacine Pouye est une multipreneure catholique qui est à la tête de 3 entreprises au Sénégal. À travers cette interview qu’elle a bien voulu nous accorder, elle nous parle de son parcours entrepreneurial, de sa relation avec Dieu, de son engagement envers l’Eglise et donne des conseils aux jeunes catholiques qui souhaitent se lancer dans l’entrepreneuriat.

Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs, s’il vous plaît ?

Je suis Elisabeth Yacine Pouye, fondatrice des marques Savonnerie Francisco, Mobilier du Sénégal et Pierrot Glace. Je suis chrétienne catholique et je suis de la paroisse Saint Jean-Paul II de Guédiawaye.

Pouvez-vous nous parler de votre parcours professionnel ? Quel a été le chemin parcouru avant de vous tourner vers l’entrepreneuriat ?

Mon parcours professionnel, je le décrirai comme un parcours normal, parce que je rends grâce à Dieu, j’ai eu la chance d’intégrer de grandes sociétés de la place, soit en tant que stagiaire, soit en tant que salariée à temps plein. Et j’ai travaillé dans des entreprises dont les activités principales étaient en corrélation avec ma formation, mes études. Donc j’ai été dans la logistique au niveau du Port, j’ai également travaillé dans le domaine du marketing, dans le commerce et aussi dans une banque.

Je dois dire que j’ai très tôt eu certaines responsabilités. Ce qui m’a permis entre autres de m’asseoir professionnellement pour pouvoir prétendre à l’entrepreneuriat. Parce que c’est très important d’avoir une certaine expérience professionnelle avant de se lancer dans l’aventure entrepreneuriale. Aujourd’hui, les gens qui passent directement de l’école à un business propre ou qui juste après leurs études ont hérité d’un business, souffrent d’un manque d’expérience. L’expérience est un facteur très important et il faut absolument en avoir avant de chercher à avoir quelque chose pour soi.

Il est donc important selon vous de faire une immersion dans le monde professionnel, en entreprise, avant de se lancer à son propre compte alors ?

Oui c’est très important. Là où c’est utile c’est que quand on devient patron sans être passé par la vie en entreprise c’est qu’on a du mal à savoir ce dont souffre le bas de l’échelle. Alors que quand on prend le temps de travailler dans une boite avant de passer à son propre compte on sait pertinemment là où le bât blesse. On peut savoir aisément de quoi souffre le gardien, de quoi souffre la ménagère, la secrétaire, le commercial, le directeur commercial, etc. Et quand on a la chance (je dis bien que c’est une chance) d’avoir fait une immersion en entreprise, d’avoir rampé, c’est une vraie bénédiction.

C’est noté. Vous êtes actuellement multipreneure. Vous avez plusieurs entreprises à votre actif. Est-ce que vous pourriez nous parler du concept développé dans vos différentes sociétés ?

Alors, la Savonnerie Francisco c’est une savonnerie bio parce que nous sommes à l’ère du bio, nous reprenons nos anciennes habitudes de consommation. Que ce soit en Afrique, en Europe, sur les autres continents, nous avons traversé une grande phase d’industrialisation dans laquelle il fallait faire de la production à grande échelle, satisfaire plusieurs marchés, etc. C’est ce qui a amené à une production de produits industriels, dont la plupart aujourd’hui sont cancérigènes ou nocifs pour la santé en général. Les gens ont donc compris désormais qu’il faut se tourner vers le bio.

Moi je pense et j’ai l’habitude de dire que chez nous en Afrique, on est longtemps resté en rade face à la transformation alimentaire, par rapport aux pays occidentaux. Ce qui fait que nous mangeons et consommons assez sains. Donc le bio n’est pas en soi une nouveauté chez nous. On veut certes nous imposer ce label bio mais nous, nous mangeons bio d’une certaine façon. Dans les villages par exemple, les gens mangent bio. Mais par contre dans les villes, nous sommes pris d’assaut par tout ce qui est produits industriels, peu naturels, etc.

Et c’est là que la Savonnerie Francisco a sa part, même si aujourd’hui il y a beaucoup de groupement de femmes qui sont spécialisés dans la savonnerie naturelle, etc. Chez  Savonnerie Francisco, nous faisons des savons de toilette, qui permettent aux clients de retrouver la nature et les procédures de saponification ancestrales. Nous utilisons des huiles végétales, qui ont de belles vertus cutanées, etc. Alors, pour la Savonnerie Francisco, c’est ça.

En ce qui concerne Mobilier du Sénégal, c’est une marque qui regroupe des artisans locaux, des gens qui n’ont pas eu la chance de se formaliser (ou qui ne peuvent pas se formaliser). Donc à travers Mobilier du Sénégal, ils se formalisent, je leur montre comment faire pour dépasser ce stade informel et passer à l’étape de formalisation. Au Sénégal, beaucoup d’artisans ne prennent pas forcément le temps de se conformer aux réalités du marché, de se formaliser, ce qui fait que les gens n’ont pas confiance et préfèrent aller importer des meubles ailleurs. Alors qu’il y a de très bons artisans ici qui font d’excellentes créations. Mais de plus en plus les gens commencent à faire confiance aux locaux.

Et pour Pierrot Glace, quelle est l’idée derrière ?

Pour ce qui est de Pierrot Glace c’est une marque qui n’a pas encore pris son envol. C’est une entreprise à travers laquelle je produis de la glace à l’italienne et que je commercialise à très bas prix en banlieue, pour les personnes qui n’ont pas la possibilité d’aller chez Nice Cream ou chez les autres glaciers chers de la ville. Pourtant j’utilise les mêmes procédés de fabrication que ces glaciers, mes glaces sont toutes aussi bonnes mais je fais du low cost afin que les gens puissent s’y retrouver.

Quel est votre élément différenciant par rapport aux autres glaciers ? En dehors de vos tarifs qui sont bas ?

Tout d’abord, je fais des glaces à l’italienne. Je pense que les autres en font aussi mais je n’en suis pas sûre mais moi je fais essentiellement des glaces à l’italienne avec des machines haut de gamme, j’utilise les mêmes ingrédients, sauf que mes matières premières sont bio. J’utilise notamment du lait bio qui vient de Matam. Dans mes entreprises, je m’inscris dans une logique de soutien et de compassion, ce qui fait je me ravitaille auprès des producteurs locaux qui sont loin et qui doivent absolument écouler leurs productions afin de subvenir à leurs besoins et ceux de leurs enfants. Donc j’achète auprès d’eux.

Chaque semaine je reçois mes produits bios qui me sont livrés et c’est à partir de ce lait là que je fais ma production. Donc ça fait bien une différence par rapport aux autres. Dans tout ce que je fais, je mets en avant cet aspect de compassion et d’entraide afin que chacun puisse y trouver son compte. C’est pour cela qu’à travers Pierrot Glace, j’apporte mon soutien à ces producteurs qui vivent dans des régions éloignées et souvent dans des conditions difficiles en me ravitaillant auprès d’eux.

Quelles ont été vos motivations au moment de lancer vos différentes entreprises ? Qu’est-ce qui vous a poussé à vous lancer dans l’entrepreneuriat ?

(Rires) Je suis une personne de nature très autonome. Peut-être que c’est lié à ma situation familiale parce que chez moi je suis l’aînée. J’ai un frère et une sœur. Et mon père lui aussi est très touche-à-tout. Il a enseigné dans de grandes écoles au Sénégal, il est très bien connu, une grande personnalité. Quand il travaillait sur les petits chantiers de la maison, j’étais là pour l’aider. Par exemple, quand il fallait réparer une chaise, c’est moi qui apportais les outils, etc. Donc très petite j’ai rapidement su ce qui servait à quoi.

Pour la plomberie par exemple, je peux aujourd’hui vous dire ce dont vous aurez besoin pour réaliser un tel travail, pareil pour le carrelage, etc. Mon père, c’est quelqu’un qui m’a très tôt initiée à ces différentes activités parce que j’étais l’ainée de la famille. Même quand il fallait aller acheter le matériel, c’est moi qui étais envoyée à la quincaillerie, c’est moi qui allais acheter le ciment, qui tenait les charrettes, etc. En fait j’ai très tôt été mise dans cet environnement où j’ai non seulement apprivoisé les grands commerçants et j’ai très tôt détecté en moi le désir d’être comme ces gens qui étaient indépendants, qui étaient leurs propres patrons, leurs propres chefs, qui n’avaient de compte à rendre à personne mais qui par contre travaillent jour et nuit. Cette initiation m’a également permise de comprendre beaucoup de choses dans le domaine du business.

J’ai l’habitude de dire une chose : moi j’adore les cars rapides par exemple. Ces cars, lorsqu’on les prend, c’est là qu’on se rend compte des réalités locales. On a la possibilité de voir et d’entendre des choses, d’observer les marchands ambulants, etc. Et grâce à ces observations, de nouvelles idées commencent à germer dans l’esprit. On commence à se demander ce qu’on peut faire pour améliorer les choses, aider telle personne dans son activité, etc.

Donc comme je vous le disais, depuis toute petite j’ai toujours eu en moi cette fibre entrepreneuriale. Mon premier business a d’ailleurs été la photographie. J’avais demandé à mon père qui était parti en voyage de me ramener un appareil photo. Et quand il a amené l’appareil, il pensait que je serais là à faire des photos, les mettre dans des albums par ci par là, faire la star (rires). Mais en fait j’avais une autre idée derrière la tête. Je savais que quand j’aurais l’appareil j’irai acheter des pellicules, sachant qu’une pellicule vide coûtait environ 300 F à l’époque.

Et quand j’achetais les pellicules, ce que je faisais c’est que j’amenais mon appareil photo, lorsqu’on avait des fêtes dans notre communauté ecclésiale de base et je faisais les photos. Pendant les mariages, les évènements, etc., je faisais office de photographe. Je faisais les photos que je revendais et les gens achetaient. Donc déjà à ce jeune âge où les gens ne pensaient pas forcément à faire quelque chose dans le sens de l’entrepreneuriat moi j’y pensais déjà.

Vous avez donc eu la fibre entrepreneuriale très tôt.

Oui très tôt. Je faisais mes photos et je les revendais à 500 F alors que pour la reproduction je payais 150 F. Donc, j’arrivais à dégager un certain bénéfice. Je ne perdais pas. Après il y a eu l’arrivée des smartphones et j’ai zappé ce business parce que les gens pouvaient faire leurs photos eux-mêmes. Je me suis tournée vers la vente de déodorants, je les prenais chez une dame qui faisait de la reconversion et qui sortait de prison. Donc pour l’aider je m’approvisionnais chez elle et je revendais. Et le bénéfice tiré de ce business me permettait de vaquer à mes occupations ou de réfléchir à un autre business. Par la suite, je me suis lancée dans la vente de friperies. J’achetais en gros et je revendais après à l’unité.

Je vous raconte tout cela pour vous dire que lorsque l’on veut être entrepreneure, il ne faut surtout pas avoir honte de faire certaines choses. Même si on a de gros diplômes, il ne faut pas être complexé ou avoir honte de faire quelque chose de différent. Aujourd’hui, quelqu’un qui a  un Bac + 5 comme moi par exemple, ne se voit pas aller prendre de la friperie et revendre ça. Les gens sont complexés. Moi j’ai pris de la friperie et j’en ai vendu malgré mes diplômes parce que je ne suis pas complexée. Et quand je faisais ça j’avais 300% de bénéfices. Avant que les gens ne commencent à s’intéresser au secteur de la friperie, j’y ai été.

Et pour vous donner un autre exemple : imaginez une femme qui vend de l’arachide devant chez elle. Depuis des années, elle ne fait que ça. Il faut comprendre que si elle continue à le faire c’est parce qu’elle en tire quelque chose derrière, un certain bénéfice. Mais les gens vont banaliser le commerce de la dame parce qu’elle vend juste des arachides alors qu’en réalité, elle se fait de gros bénéfices. Et c’est la personne qui n’a pas compris ça qui passe à côté de quelque chose. Parce que les gens qu’on sous-estime, les business qu’on minimise sont souvent très fructueux. Moi je n’ai pas honte de me lancer dans un business. Je me lance d’abord, je teste, et si je n’ai pas la possibilité de le faire, je file l’idée à quelqu’un que je connais et qui serait capable de le faire.

Pour ce qui est de mon entreprise actuelle (Savonnerie Francisco), l’idée m’est venue après mon aventure entrepreneuriale dans la friperie. La compagnie pour laquelle je travaillais en tant que salariée avait été délocalisée en Casamance.  Et à ce moment je portais mon enfant, mon fils ainé, et je ne pouvais pas aller en Casamance. Donc j’ai dû renoncer au poste qui m’était proposé là-bas. A partir de là, je me suis dit qu’au lieu de rester les bras croisés, j’allais me lancer dans mon propre business à temps plein. C’est dans mes réflexions que m’est venue l’idée de la Savonnerie Francisco. Mon fils ainé s’appelle Francisco et c’est pendant que je le portais que j’ai eu cette idée de projet. D’où le nom Francisco que porte la savonnerie qui est en réalité un hommage vivant à mon fils aîné, vu que c’est pendant que je le portais que j’ai eu l’idée de cette savonnerie.

En tant que femme entrepreneure chrétienne catholique, qu’est ce qui selon vous, vous différencie des autres entrepreneurs ?

En tant que femme chrétienne, je dirai que rien ne me différencie des autres entrepreneurs (rires), parce que les entrepreneurs souffrent des mêmes difficultés. Vous trouverez les mêmes problèmes partout. Après, la différence va se situer au niveau de la capacité à dépasser ces difficultés. Sinon, elles sont les mêmes pour tous les entrepreneurs. En fait, l’entrepreneuriat c’est tout un cheminement à faire : on va se décourager, tomber sur des personnes difficiles, être confronté à un manque d’expérience parce qu’on apprend quelque chose chaque jour. Quand on entreprend, on est parfois face à des situations difficiles à régler du fait d’un manque d’expérience. Et quand on a de l’expérience ça devient plus facile à gérer.

Pensez-vous que votre foi chrétienne vous aide à mieux surmonter les péripéties de votre vie d’entrepreneure ?

Oh que oui ! La dernière fois on l’a d’ailleurs entendue dans l’évangile : « la foi sans action est vaine ». « Montre-moi ta foi sans les actes et je te montrerai mes actes avec la foi ». On l’a dit la dernière fois à l’Eglise d’ailleurs. C’était le sujet de l’Evangile du dimanche passé. La foi représente le socle même de tout cela. Si on n’a pas la foi, on ne peut pas persévérer et moi je crois fermement que sans Dieu on ne peut pas évoluer en entrepreneuriat et même dans la vie en général. On est dans des situations où si tu n’as pas la foi tu auras des difficultés à évoluer.

Moi par exemple, quand je me retrouve dans des situations compliquées, je vais demander des messes, faire une neuvaine ou me lever à 3h du matin pour prier. Je vais ouvrir la Bible. Dès que j’ouvre la Bible, je tombe sur la bonne parole et j’ai la solution à mes problèmes devant moi. Il me suffit de prier, de comprendre la parole divine, de m’assagir et de reprendre des forces. Donc sans la foi, c’est très compliqué d’avancer.

En tant qu ‘entrepreneure, arrivez-vous à trouver du temps à consacrer à votre vie spirituelle ?

Au contraire, quand j’étais salariée, c’est là que c’était compliqué pour moi de prier. C’est à ce moment que j’ai eu « Mon parcours de Job », la religion ce n’était pas vraiment ça. Ce n’est pas que je ne croyais pas mais je n’avais pas le temps parce que je courais derrière mes responsabilités et je faisais passer Dieu après. Mais c’est dans mon parcours de Job qu’un jour mon père m’a parlée. Et ma mère aussi. Et je me rappellerai toujours de cette phrase de mon père. Il m’a dit : « On ne se fout pas de Dieu ». « Fous toi de Dieu et il se foutra de toi », c’est ce qu’il m’a dit. Et quand je travaillais, parce que j’étais vraiment obsédée par l’ascension professionnelle, par l’argent, je mettais vraiment en rade tout ce qui était relatif à ma foi, et ça faisait très mal à mon entourage, à ma famille.

Et quand j’ai eu ce que j’aime appeler « mon parcours de Job », j’ai compris que Dieu, quand on se fout de lui, il se fout vraiment de toi. Et là j’ai avancé, j’ai repris de mes peines, de mes difficultés, j’ai eu ce besoin ardent d’être plus proche de Dieu, de le découvrir davantage, de respecter ses commandements.

J’essaie de le faire comme je peux, parce que dans la vie, je suis une personne très taquine, je fais beaucoup rire les gens. Mais pour ce qui est du côté religieux, je ne le prends pas à la légère. Je fais les Laudes chaque matin, je fais les Sextes, les Nones, les Complies, etc.

A un moment de ma vie, j’en avais marre de ne pas pouvoir aller à la messe, de ne pas être en mesure d’avoir cette relation intime avec Dieu etc. Donc j’ai eu le temps de me rendre compte de la beauté de Jésus-Christ.

En tant qu ‘entrepreneure, si je me lève assez tôt, c’est pour pouvoir prier en silence et ça prendra le temps qu’il faudra. Tant que je n’ai pas fini, je ne sors pas de ma prière. Et cela peut même durer toute la matinée, avant que je ne commence à travailler. Les gens qui travaillent avec moi, dès qu’ils viennent, ils savent ce qu’ils doivent faire et moi pendant ce temps-là, j’entre en relation avec Dieu. Je prie beaucoup plus en tant qu’entrepreneure que quand j’étais salariée.

Dans votre paroisse, comment êtes-vous engagée ? Comment rendez-vous service à l’Eglise ? 

Je suis la responsable de communication de la paroisse et je me charge aussi de la communication sur le projet de construction de la nouvelle Eglise.

Participez-vous à des activités bénévoles au sein de la paroisse ?

Oui moi j’y suis obligée (rires) en tant que responsable de la communication. Je coordonne les activités de la commission, il faut fournir des rapports, garder les archives, etc. Donc ça me permet aussi de connaître les gens mais aussi leurs compétences. Je le fais dans une double utilité : D’une part pour rendre service à la paroisse, d’autre part pour détecter les gens qui ont du potentiel, les recommander pour des travaux à mes relations ou pour qu’ils puissent travailler avec moi. Je suis à 98% présente au niveau de la paroisse.

Au-delà des RSE, comment venez-vous en aide à l’Eglise à travers vos différentes entreprises ?

Alors, ma conception des choses est telle que dans la vie, il faut s’entraider. Chacun de nous, chaque être humain a un tant soit peu été aidé par quelqu’un. On ne voit pas forcément Dieu mais nous le voyons à travers nos prochains. Dieu ne va pas descendre pour nous parler, ça c’est sûr. Mais il peut passer par des personnes pour nous faire comprendre son message d’amour. C’est ce qui fait qu’aujourd’hui je viens en aide à beaucoup de personnes, la majorité des gens avec qui je travaille au quotidien sont des personnes soit qui sont dans la reconversion parce qu’ils ont eu un parcours compliqué soit qui ont été victimes de discrimination, etc.

Donc je travaille avec des gens comme ça et j’offre beaucoup de dons. En fait, j’évite de dire que j’offre des dons parce qu’en réalité je travaille pour ça. J’alloue une partie de mon travail à des personnes défavorisées, des gens qui sont dans des conditions extrêmes, des malades physiques ou mentaux, les personnes incarcérées, etc. J’offre une partie de ma production à ces gens ou aux associations qui s’occupent de ces personnes en difficulté, aux maisons d’enfants, etc. Disons que j’offre une partie de ma production aux personnes défavorisées. Ce ne sera pas un don pécuniaire mais ça sera en nature.

Dernière question, de par votre expérience, quels conseils pourriez-vous donner aux jeunes chrétiens qui aimeraient se lancer dans l’entrepreneuriat à l’heure actuelle ?

A l’heure actuelle, ce que je pourrai dire aux jeunes cathos chrétiens, c’est d’abord d’aimer Dieu et de le craindre. Aimez Dieu et craignez-le, donnez-lui tout ce qui lui revient et il saura s’occuper de vous et de vos affaires. C’est déjà une première chose.

La deuxième chose c’est Apprendre, ne pas refuser l’apprentissage. Ce n’est pas parce qu’on est comptable qu’on ne peut pas aller apprendre à faire des arachides. Ce n’est pas parce qu’on est avocat qu’on ne peut pas aller apprendre un travail manuel. Il ne faut pas refuser d’apprendre. Toujours apprendre. A chaque fois qu’on ouvre la Bible on a l’impression d’apprendre quelque chose de nouveau. La vie c’est comme ça aussi. Il faut aller à l’information.

L’autre chose aussi c’est quand on n’a pas les finances, il faut oser lancer quelque chose avec de faibles moyens. Moi je n’ai pas été financé par qui que ce soit. C’est avec mes économies que j’ai lancé mes affaires. Au fur et à mesure que ça a commencé à prendre, il y a des gens qui me disaient « ok, je peux te donner ceci, je te prête cela, etc. ». J’ai accepté leur aide parce que moi ça me permet de rouler et d’acheter des matières premières. Même si on a 100 F, on peut commencer avec 100F. On n’a pas besoin de commencer avec 1 million.

Souvent quand les jeunes de ma paroisse m’interpellent parce qu’ils veulent faire des business, je leur dis clairement qu’ils n’ont pas besoin d’avoir un million pour commencer. Commencez avec 10. 000 F ou 15.000F. Par exemple, le petit qui fait le marchand ambulant, il ne commence pas avec un million. Il s’approvisionne avec ce qu’il a et après les ventes il a ses bénéfices. Et c’est comme ça qu’il va finir par ouvrir une grande boutique, un jour, il va demander un million et on va le lui prêter.

La banque ne prête pas à une activité inexistante. Elle ne prête qu’aux activités existantes, elle vérifie si l’activité fonctionne et si c’est le cas, elle octroie le prêt. Donc il faut que les jeunes comprennent qu’on commence petit à petit. Comme le dit l’adage Petit à petit, l’oiseau fait son nid.

L’autre chose aussi c’est d’avoir la tête sur les épaules. On ne peut pas être entrepreneur et être riche tout de suite. Si on suit cette logique, on risque d’avancer dans l’hypocrisie, le vol, le mensonge, le détournement, etc., ou même être poussé dans le mysticisme ou autres pour que ça avance plus vite. Il faut avoir la tête sur les épaules. Et comme moi je le dis tout le temps, savoir faire la différence entre l’urgent, l’utile et l’impératif. Voilà en quelque sorte ce que je peux dire aux jeunes. Ce n’est pas facile, il faut aimer Dieu comme je l’ai dit tantôt, être prêt à faire un sacrifice sur soi, commencer petit à petit et surtout persévérer parce que ce n’est pas facile et accepter d’apprendre. Il n’y a que ça comme secret.

Et il y aussi quelque chose de très important : aider son prochain. Parce qu’il y a une chose aujourd’hui que les cathos ne font pas. On a beaucoup de hauts responsables, des gens haut gradés chez nous, les cathos. Malheureusement non seulement on n’ose pas entreprendre. Mais aussi comme le disait mon ami Feu Richard, il ne faut pas qu’on soit des chrétiens R+2. C’est-à-dire tu as ta maison R+2 , ta voiture 4×4, ton salaire, ta famille, c’est bon, c’est terminé. Il faut qu’on accepte de s’entraider, de sortir de notre cocon.

Il faut qu’on accepte de créer des choses pour les cathos, de prendre des jeunes cathos qui veulent travailler. Il faut qu’on accepte de faire des choses pour les aider. Jésus Christ a vaincu la mort sur la croix donc nous aussi on peut gagner dans la vie.

Votre mot de fin ?

Il faut que les gens comprennent que ce n’est certes pas facile mais il ne faut pas avoir peur. Il ne faut pas sous-estimer certains travaux. Malheureusement on sous-estime trop certains boulots. On ne veut pas être maçon, on ne veut pas être menuisier, etc. Et j’aimerais insister  sur ça. Pendant le covid, les menuisiers, les maçons, ils n’étaient pas au chômage. Ce sont les gens qui sont dans les bureaux qui ont été virés. Donc il ne faut pas négliger le travail manuel. D’ailleurs moi mon saint patron c’est Saint Joseph. Le travail de vos mains, le Seigneur le bénit. Moi je ne manque pas de prier Saint Joseph parce que c’est l’homme de toutes les situations. C’est mon Saint patron dans mon travail. Que ce soit pour les savons, parce que c’est un travail manuel, je les fais à la main, je n’ai pas de machine, que pour Mobilier du Sénégal, il reste mon Saint patron.

Propos recueuillis par Eliane Christiane Nahum

1 commentaire

  1. Merci pour ce beau témoignage et pour tous vos conseils Dieu continue de veiller sur vous et de vous bénir

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